Passage chez le « Friseur »
Dessin de F.L. Bertrand © AANG
Entrée du camp extèrieur de Bremen-Farge © Ed. Temmen
« Nus, nous passons dans une autre salle où l’on nous rase tout le système pileux, couché sur une planche à claire voie, jambes écartées, travail effectué par des détenus de toutes nationalités. Puis douche alternativement bouillante et froide, sans savon, ni serviette. Après une désinfection, le corps est badigeonné entièrement d’un liquide jaunâtre très piquant, enfin, humiliation extrême, la fouille anale où certains ont caché une bague, une alliance.
Nous formons un long cortège de mannequins nus qui est ensuite dirigé sur une autre baraque où nous sont distribués, sans distinction de taille, un léger costume rayé, une chemise, un caleçon court, deux morceaux de tissu remplaçant les chaussettes et une paire de claquettes maintenues aux pieds par une ficelle.
Ensuite nous entrons dans un autre block où d’autres détenus assis derrière des machines à écrire nous attendent.
Un SS debout sur une table nous souhaite la bienvenue, la schlague à la main : « Ennemis du peuple allemand, vous devez travailler dur. Ici, vous êtes entrés par la porte, vous n’en sortirez que par la cheminée. »
Suit une interrogation, état civil complet, profession, domicile, parents, etc. Cela dure une bonne partie de la nuit. Le détenu HIRTH a vécu, il devait devenir pour l’éternité le 37014.
La vie à Farge
« Aufstehen ! (debout) Hurlement d’un Chef de Block ou d’un Kapo du Bunker où nous dormons ( plus d’un millier d’hommes dans un réservoir souterrain ) sur des paillasses humides et douteuses, entassés les uns contre les autres, mélangés ( 14 nationalités ), fatigués, affamés, désaxés et automatisés par cette atmosphère de folie permanente qui nous entoure et nous précipite de force dans ce je ne sais quoi qu’on appellera après la Libération La vie à Farge. C’est le début d’une journée ordinaire. Quelle heure est-il ? 4 heures ? 5 heures ? Personne ne s’en inquiète. Il n’y a ni montre, ni heure ici. Que des corps maigres, gelés et nus ( Allemands, Polonais, Russes, Grecs… ) qui doivent sous les coups de schlagues et au milieu des cris et des insultes se précipiter vers les quelques points d’eau. En tous cas les Français passeront les derniers. En une minute ( pas plus ), sans savon, sans serviette, la toilette doit être terminée, puis, si on a de la chance, on peut avoir accès aux tinettes… »
Témoignage de Lucien Hirth pour le CRDP de Champagne-Ardenne.
Pour le témoignage complet, consulter le site du CRDP :
http://crdp.ac-reims.fr/memoire/enseigner/memoire_deportation/temoins51/hirth.htm#farge